Après un long processus de création et de peaufinage, Breakbot sortait en septembre 2012 son tout premier album, « By Your Side », une galette scintillante de 14 titres qui ravivait avec grâce les plus belles sonorités funk d’antan, couplées à la douceur pop et électronique des machines de Thibaut Berland.« Still Waters », le second disque de l’homme barbu – ou plutôt des hommes barbus, Irfane s’étant désormais définitivement joint à son fidèle acolyte pour former un duo à part entière – a une nouvelle fois pris le temps de se faire une beauté pour se dévoiler intégralement en ce 5 février 2016. Impatients de découvrir le résultat ? Vous faîtes bien…
Prêt depuis l’été dernier, « Still Waters » s’ouvre d’emblée sur « Back For More », le premier extrait que Breakbot nous avaient (pluriel, eh oui, ils sont désormais deux !) offert il y a quelques mois. Quasi intégralement instrumentale, cette introduction est la rampe de lancement qui caractérise le ton de ce nouvel album. Avec son tempo plus doux et moins dansant qu’un « Break Of Dawn » – piste qui ouvrait le premier album – on comprend que ce nouveau LP ne nous emmène pas immédiatement sur le dancefloor, mais nous offre d’abord un voyage sur des eaux aux remous sensuels.
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Dans le prolongement des basses groovy surgissent, sur « Arrested », les claviers aigus et… une voix féminine ! Celle de Yasmin (Yasmin Zarine Shahmir, chanteuse et DJ britannique). Premier changement de marque par rapport à « By Your Side », où seules les voix de tête mâles d’Irfane, Ruckazoid et Björn Synneby (Pacific!) s’imposaient, cette première introduction féminine nous saisit. Avec ce superbe timbre qui lui est propre, Yasmin nous ramène aux premières heures d’une Janet Jackson. Délicieusement régressif, ce track extrêmement soigné traduit bien la volonté d’amener ce funk épris de pop vers ses plus anciennes origines que sont le rhythm’n’blues et la soul.
« The Sweetest Romance » fait doucement monter le tempo d’un cran. Avec son amorce purement Breakbotienne, sa basse profonde et déformée jouée au clavier, le déhanché se fait encore suave. Comme une complainte amoureuse, le chant sur la corde d’Irfane renforce le côté lascif aussi bien porté par les textes que les instrumentaux au sein de ce prélude de « Still Waters ». On entend d’ailleurs déjà quelques clapotis et voix d’enfants au bord d’une piscine à la fin du track, mais nous en sommes pas encore là…
Car c’est d’abord l’une des pistes les plus sexy de l’année 2016 qui nous attend. « 2Good4Me », dernier extrait en date de l’album, nous fait passer du déhanché tranquille au groove en corps à corps. Aussi différent dans son approche que les trois titres précédents, tout en conservant la patte de Breakbot, « 2Good4Me » s’avère être une déclaration d’amour à la sensualité.
C’est d’ailleurs à ce moment là que les différentes pistes semblent se répondre les unes aux autres par l’alternance de voix masculine et féminine. Le retour de Yasmin au chant sur « My Toy », une des pistes coup de cœur incontestables de ce nouvel opus – qui flaire bon le prochain single, ne laisse plus de doute : cette fois-ci les hostilités sont véritablement lancées. Sur un tempo extrêmement enlevé, porté par une ligne de basse bondissante et tout bonnement légendaire, Yasmin reprend les rennes et pousse la sensualité exprimée précédemment encore plus loin. Les délicieuses paroles sonnent comme une réponse à « 2Good4Me » et l’on comprend pourquoi Thibaut et Irfane « Get Lost » dans la foulée.
Au groove succède le groove et l’on atteint là, au milieu de l’album, l’apogée de « Still Waters ». ‘On dirait que l’on poursuit quelque chose’ confiait Thibaut à propos de ce titre, certainement la beauté de cette voix féminine pleine de promesses. Accompagné d’un excellent clip réalisé par Dent de Cuir, « Get Lost » synthétise toutes les qualités des cinq premières pistes dans la droite lignée du tempo de « My Toy ».
Après ce passage ‘up-tempo’, « Still Waters » revient à un groove plus serein à travers la superbe basse slappée de « Turning Around ». Pouvant nous rappeler l’esprit d’un « The English Riviera » de Metronomy, cette semblance est confirmée par le ton d’une nouvelle voix féminine haut perchée, celle de Sarah Ydoux – déjà discrètement présente sur « Back For More ». On refait donc un détour par la chaise longue au bord de la piscine, jusqu’au plus commun « Man Without A Shadow » où le flow plus langoureux d’Irfane s’exprime le long de claviers disco.
Mais la machine à merveilles se relance aussitôt autour du triptyque « All It Takes » ; « Wet Dream » ; « Too Soon ». Les voix d’Irfane et Yasmin se répondent à nouveau et l’on semble approcher du dénouement. Comme une course après l’amour féminin, le refrain rageur de « All It Takes » fait ressurgir la complainte par ce chant d’Irfane qui vient des tripes. On louera une nouvelle fois le soin apporté à la composition, du beat claquant aux basses et aux claviers profonds.
« Wet Dream », titre 100% instrumental cette fois, nous permet de comprendre d’où venaient ces clapotis d’eau et cris d’enfants entr’entendus plus tôt. Il s’agit en fait là d’une introduction à « Too Soon », à l’instar d’un « Break Of Dawn » amenant « Fantasy » sur le premier opus.
Après ce crescendo, Yasmin fait son ultime apparition, comme pour doucher les espoirs et les cris du cœur exprimés sur « All It Takes ». À ‘Your love is all it takes to free this heart of mine’, Yasmin et ses chœurs s’imposent et répondent ‘You tryna catch my eye, but I ain’t lookin’ out for love’. Après une douce intro, le titre se mue en une mine d’or de groove qui en fait l’une des pépites de « Still Waters ».
Quoi de plus logique alors qu’une conclusion autour d’une ballade au piano, « In Return », comme symbole d’un épuisement ou d’un chagrin amoureux. Mais les sonorités plus enjouées du track final, éponyme au titre que ce deuxième album de Breakbot, semblent annoncer un nouveau départ rempli d’espoir. Comme « By Your Side », « Still Waters » se conclue sur un track instrumental – on en compte d’ailleurs moins sur cet album – qui s’impose comme la bande-son idéale d’une fin de soirée d’Été au bord de la piscine, ou le long d’une route encore partiellement ensoleillée.
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Là où « By Your Side » incitait à transpirer sur le dancefloor, « Still Waters » invite à suer du bord de la piscine jusqu’à la chambre à coucher. Breakbot signe (ou plutôt, signent) un très bon successeur au premier disque, dont il faut encore souligner le soin et la richesse des sonorités et des arrangements.
Alternant voix féminine et voix masculine, l’album semble être un jeu de déclarations et de réponses entre deux protagonistes empreints d’un certain désir de l’autre, jouant au chat et à la souris – jusqu’à l’épuisement – au fil des tracks. Mais point de renoncement, un nouveau départ s’annonce… pour un éternel recommencement ?
L’eau ne reste jamais calme trop longtemps avec Breakbot…
Intégralité de l’album disponible à l’écoute le jour de sa sortie, vendredi 5 février 2016.